Le degré de transparence orthographique des langues se situe sur un continuum allant des langues les plus opaques, comme l'anglais et les
langues scandinaves, aux langues les plus transparentes, comme l'italien et l'espagnol. Par transparence, l'on entend le degré d'univocité des correspondances graphème-phonème: si à un seul
phonème dans la langue orale correspond un seul graphème dans la langue écrite, on parle alors d'orthographe transparente. Lorsque, au contraire, un phonème à l'oral peut se traduire à l'écrit
par plusieurs graphèmes, on parle plutôt d'orthographe opaque. Où se situe le français sur ce continuum? Selon les cours ASS6826 (Dépistage des difficultés en lecture et en écriture)
et DDL5735 (Didactique de l'écriture au préscolaire et au primaire), l'orthographe française est, sans surprise, plutôt opaque. Nous n'avons, par
exemple, qu'à penser aux multiples graphèmes qui peuvent marquer à l'écrit le son [o]: o, au, eau, ô, etc. Or, cette difficulté, liée à la dimension
phonogrammique de l'orthographe française, pose un défi extraordinaire aux apprentis scripteurs lorsqu'ils essayent de transcrire les sons entendus dans la forme orale d'un mot. J'ai pu constater
par moi-même cette difficulté: lors de mes stages, la question suivante m'a été effectivement posée un nombre incalculable de fois: « Comment écrit-on ce mot? »
Or, faut-il donner immédiatement la réponse à l'enfant dans un tel cas? Selon les deux cours mentionnés ci-dessus ainsi que selon la littérature, il n'est pratiquement jamais recommandé de faire
cela. En procédant ainsi, on ne favorise pas le développement de stratégies chez l'enfant. Bien au contraire, on favorise plutôt sa dépendance auprès de l'adulte qui agit alors comme une
sorte de « dictionnaire ambulant ». Dans ce cas, quelles sont les stratégies avec lesquelles il faut outiller les élèves avant de leur permettre de déterminer, par eux-mêmes, l'orthographe d'un
mot?
Selon Saint-Laurent (2008) et le cours DDL5735 déjà mentionné, il faut enseigner aux
enfants les stratégies suivantes afin de les amener vers une plus grande autonomie lors de l'écriture de mots nouveaux:
-la correspondance graphophonologique, soit la stratégie élémentaire: comment écrire les sons que j'entends?
-l'association masculin/féminin: je mets un mot au féminin et j'entends ainsi la lettre muette ou le morphogramme lexical final (ex: vert/verte)
-la décomposition du mot en morphèmes, soit préfixe, suffixe et radical; il s'agit d'une stratégie d'analyse morphologique (ex.: véritable/ment)
-le regroupement par familles de mots (ex: fleur/effleuré)
-le recours à une règle orthographique d'usage (ex.: le «n» devant un «b» ou un «p» se transforme en «m»)
-la comparaison de plusieurs façons possibles d'écrire un mot et le choix de la façon qui semble la meilleure
-la recherche du mot dans un dictionnaire (ex.: Larousse jeunesse ou Eurêka)
-la demande d'aide: c'est le dernier recours
Ces stratégies doivent être enseignées aux élèves de façon explicite et il faut leur permettre de les pratiquer, d'abord de façon guidée, puis de façon autonome. Selon Saint-Laurent, le contexte
idéal pour faire cela est celui des orthographes rapprochées pratiquées dans un contexte signifiant, ce qui sera le sujet d'un autre billet...
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